Il faut remonter plusieurs siècles en arrière, au IIIe siècle de notre ère, pour découvrir le parcours très romancé de cet homme, dont on peine encore à savoir s'il était prêtre ou moine. Aux balbutiements du christianisme, dans une Rome antique qui persécutait les chrétiens, Valentin de Terni était connu pour marier les croyants. Des unions qui ne plaisaient guère à l'empereur Claude II le Gothique, qui préférait que les hommes se tournent vers ses guerres plutôt que vers les femmes et la construction d'un foyer. Selon la légende, c'est le souverain lui-même qui va ordonner l'arrestation de Valentin.
La même légende raconte que Valentin va se lier d'amitié avec Julia, la fille de son geôlier ou d'un magistrat chargé de sa surveillance selon les versions. Aveugle de naissance, elle va tomber amoureuse du prisonnier, qui lui racontait la beauté du monde tandis qu'elle lui apportait des vivres. Au contact de Valentin, Julia va finalement retrouver l'usage de ses yeux un soir où une lumière jaillit de la cellule. Par ce miracle et par ses mots, Valentin serait parvenu à convertir la jeune romaine au christianisme, ainsi que toute sa famille. Courroucé par la publicité de ces événements, Claude II ordonnera l'exécution de Valentin. En guise de martyr, il sera roué de coups et décapité sur la voie Flaminia... le 14 février 269.
Voilà pour le conte de fée. Dans l'ouvrage "Saint-Valentin, mon amour !", aux éditions Les Liens qui libèrent, l'historien et sociologue Jean-Claude Kaufmann raconte la Saint-Valentin des temps anciens. Et prouve que le "mythe" de Saint Valentin, en tant que personnage chrétien, a été largement détourné à des fins politiques et religieuses. De quoi surprendre ceux qui abhorrent cette fête souvent jugée trop mièvre ou archi-commerciale.
Selon Jean-Claude Kaufmann, il existe plusieurs saints du nom de Valentin qui ont été, à l'origine, protecteurs du "vignoble contre le phylloxéra", "des vaches", "de la maladie" et même de "la culture des oignons"... Mais pas de l'amour. Et il y a pire. Jean-Claude Kaufmann fait l'inventaire des traditions pour le moins douteuses voire totalement abjectes qui ont, au fil des siècles, abouti à la naissance de la Saint-Valentin telle que nous la connaissons aujourd'hui. L'auteur de "Saint-Valentin, mon amour !" cite notamment le culte de l'ours, qui fut célébré au Moyen-Age, loin du romantique Valentin qu'on nous présente depuis. Considéré comme l'animal le plus proche de l'homme et à la sexualité débridée, il fut l'objet de bien des théories comme celle de l'évêque Guillaume d'Auvergne, qui écrivait en 1231 que "lorsqu'une femme s'accouple avec un ours, elle donne naissance à un bébé humain".
Plus loin encore dans l'horreur, l'auteur rappelle que lors des fêtes antiques des Lupercales, à l'origine de la Saint-Valentin, il s'agissait de "purifier" les femmes en leur fouettant les fesses ou le ventre pour s'assurer de les rendre fécondes. Au XVe siècle, dans une société où la sexualité était bridée et le mariage solidement encadré, une autre tradition procédait par des viols collectifs, acceptés par la société. "De jeunes hommes se rendaient chez la victime, pendant la nuit, faisaient du chahut sous ses fenêtres pour l'appeler, en la traitant de 'ribaude'. Puis, comme elle se taisait, on enfonçait sa porte", écrit Jean-Claude Kaufmann, qui indique que le phénomène était si massif que la moitié des hommes avait déjà participé à ce type de viol et que les victimes, dépucelées avant le mariage, n'avaient d'autre choix que la prostitution.
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